Un Maître de l’inclusion
Un Maître hassidique, un Maître de la Nouvelle Terre : Rav Abraham Ifrah
Sur les traces de Bob Dylan, Abraham Ifrah a croisé le chemin des disciples de rabbi Nahman. Le rav Ifrah est aujourd’hui l’un des maîtres les plus réputés du hassidisme.
Le rav Abraham Ifrah reçoit dans sa petite imprimerie de Mea-Chearim, au cœur de la Jérusalem juive orthodoxe. Arborant de longues papillotes grisonnantes, ce quinquagénaire chaleureux l’est un des maîtres hassidiques les plus actifs du mouvement Breslev.
Comme tous les disciples de rabbi Nahman, il s’efforce de vivre un judaïsme rigoureux mais surtout empreint de joie et de sincérité.
« Quand le cœur est joyeux, on est débarrassé des passions de ce monde. C’est la tristesse qui crée l’envie », nous dit le rav Ifrah.
« Rav » et non « rabbin ». Car Abraham Ifrah est un érudit, qui dispense quotidiennement des cours de Torah, mais il n’est titulaire d’aucune charge communautaire ou de titre honorifique.
Les journées du rav commencent bien souvent au milieu de la nuit.
Suivant l’enseignement du rabbi Nahman, il se couche tôt, aux alentours de dix-neuf heures, pour se réveiller peu après minuit.
« La seconde partie de la nuit est propice à l’étude car les portes du ciel et de la miséricorde sont grandes ouvertes », confie-t-il.
Le rav profite donc de ces heures cruciales pour étudier les textes sacrés et pratiquer la Hitbodédout, littéralement l’isolement. Cet usage est au cœur de la pensée Breslev. Il consiste à s’isoler quotidiennement une heure, si possible en pleine nature, et à s’adresser à Dieu dans sa langue maternelle.
Exempte de tout rite codifié, la Hitbodédout est censée soulager l’homme de ses angoisses et de ses combats intérieurs. Une sorte « d’autopsychanalyse ». « Rabbi Nahman voulait que l’on établisse un dialogue direct avec Dieu », dit plutôt le rav Ifrah.
L’enseignement d’un médecin des âmes
À l’issue de ce rendez-vous divin nocturne, le rav se recouche pour se relever aux aurores et faire la prière du matin, obligatoire pour tous les juifs pratiquants. Et dès la fin de l’office, avec ses élèves, il danse et chante frénétiquement, à la manière hassidique. Ils recommenceront après la prière du soir, car ces manifestations de joie sont pour eux un hommage indispensable au Créateur. Dans les rues de Jérusalem, il n’est d’ailleurs pas rare de nos jours d’apercevoir les disciples du rabbi Nahman dansant en pleine rue, autour d’un camion équipé de larges enceintes diffusant des chants hassidiques.
Juste à côté de son imprimerie, le rav a aménagé un petit Bet Hamidrah, une maison d’étude. Des centaines de livres et une grande table autour de laquelle étudient tous les matins une dizaine de francophones. Comme le rav Ifrah, il s’agit le plus souvent de Baalé Téchouva, c’est-à-dire de Juifs non religieux faisant un retour à une pratique orthodoxe du judaïsme. Certains ont eu un passé tumultueux. Les Breslev sont parfois d’anciens repris de justices ou des drogués. Ce sont aussi souvent des artistes, des musiciens, des peintres.
« Ce sont des gens malades, à la recherche d’une vérité. Et c’est pour cela qu’ils viennent à nous, car rabbi Nahman était avant tout un médecin des âmes », souligne le rav Ifrah.
La pensée de rabbi Nahman
Rav Ifrah non plus n’avait rien du juif orthodoxe lorsqu’il a croisé le chemin du hassidisme. C’est Bob Dylan qui l’a amené à la religion.
Dans les années 1970, Abraham Ifrah est étudiant à la faculté de Lettres de Toulouse. Mordu de musique, il joue de la guitare et de l’harmonica le soir, dans les cafés. Un jour, il entend dire qu’une femme qui vit à Aix-les-Bains a côtoyé à New York Bob Dylan, son idole. Il n’hésite pas à faire le voyage en Savoie pour la rencontrer. Mais entre temps, la jeune bohème est devenue une juive orthodoxe, mariée à un disciple de rabbi Nahman.
« C’est son mari, le rav Isthak Besançon, qui m’a initié au hassidisme. Immédiatement, dès la première heure d’étude, cela a été pour moi une incroyable révélation, quelque chose de très fort. J’étais un jeune homme en recherche constante de sens. Je sentais que quelque chose n’allait pas dans la vie que nous proposait la société moderne Le décor était bien trop beau, bien trop complexe, par rapport à l’usage que l’on en faisait. Par exemple je me disais : si le but de l’alimentation n’est que de nourrir son corps, pourquoi y a-t-il autant de type de fruits, des goûts si variés ? En étudiant la pensée de rabbi Nahman, j’ai commencé à comprendre. Et à vibrer ».
Le jeune homme aux cheveux longs laisse alors tout tomber, fac de lettres et ambitions musicales, pour se consacrer à plein temps à l’étude de la Torah et plus particulièrement aux textes de rabbi Nahman de Bretslev.
À l’époque, cette tendance hassidique restait très marginale, tant en Israël qu’en diaspora. Elle comptait 900 disciples il y a 20 ans, contre au moins 30 000 aujourd’hui.
Le rav Ifrah s’est imposé comme un animateur majeur du courant au sein du monde francophone. De son bureau, il répond aux questions que lui posent les disciples sur Internet.
Une fois toutes ses obligations religieuses remplies, il reste alors quelques heures au rav pour se consacrer à son imprimerie ainsi qu’à sa femme et à leurs six enfants. Un subtil équilibre de vie qui correspond là aussi à un idéal religieux.
« Rabbi Nahman conseillait de ne pas se couper de la matière, conclut le rav. Il faut plutôt relever le défi de vivre avec le monde et de l’élever. »
Le mouvement Breslev
La pensée Breslev est une branche du hassidisme.
Fondé par le Baal Chem Tov (littéralement « maître du bon nom » Israël ben Éliézer) au xviiie siècle, le hassidisme prône la foi sincère, la prière et le service divin dans la joie (notamment par la danse), plutôt que l’étude rationnelle des textes sacrés. Les hassidim sont alors en opposition frontale avec les mitnadgim (opposants) qui défendent un judaïsme plus froid, plus intellectuel, fondé essentiellement sur l’étude rigoureuse de la loi juive.
Le Baal Chem Tov disait par exemple qu’un simple cordonnier, s’il pratiquait les commandements divins avec sincérité et simplicité, pouvait atteindre un niveau bien supérieur à celui d’un grand érudit.
Arrière-petit-fils du Baal Chem Tov, rabbi Nahman est né en 1772 en Ukraine. Très tôt, il va développer une approche très personnelle de la pratique religieuse et influencer durablement le mouvement hassidique.
Au sein du courant hassidique, la principale spécificité de Rabbi Nahman est qu’il met la prière au cœur de la pratique religieuse.
« L’homme doit se perdre dans la prière, dit-il, et oublier totalement sa propre existence ».
Rabbi Nahman s’est éteint en 1811, à l’âge de 39 ans. Son message ne connaît une réelle diffusion que depuis une vingtaine d’années.
Rav Abraham Ifrah rencontre le jeune Shmouel (la réincarnation du prophète)
Le message du petit Shmouel
Voir le bien dans toutes les situations, Rav Ifrah
Toute mon assurance vient de mon attachement a Hachem… Car lorsque mon intellect flanche je passe immédiatement sur la foi (emouna) qui va me permettre de gérer la situation sans me casser…. Donc Inébranlable… C’est la seule façon de surmonter les illusions ou désillusions de ce monde.
C’est comme dans un couple, si la confiance est faible c’est à dire, que l’alliance avec Hachem est manquante, aux premiers vents on se sépare… Maintenant…, comment se renforcer pour vivre vraiment et intensément mon quotidien?…